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Christian Lefevre sculpture
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3 décembre 2012

Le BUG L’intrusion du hasard, ou de la surprise

 

 

Le BUG

 

 

 

L’intrusion du hasard, ou de la surprise semblent être de plus en plus exclus des modes de fonctionnement de nos sociétés technologiques. Le risque zéro est le leitmotiv des discours officiels et nous sommes intimement convaincus de la pertinence de ces raisonnements. La foi en la technique, l’organisation et la loi est telle que le retour du monde des origines dans notre réel provoque une surprise scandalisée.

Je traite de notre approche contemporaine au paysage et à la nature. Parti d’une réflexion sur la promenade j’ai abouti à un travail plus politique où la critique d’un mode d’appropriation du territoire se mélange à une interrogation sur la gestion collective et rationnelle d’un patrimoine commun.

Le paysage est associé au moyen matériel grâce auquel il est conservé dans notre mémoire. La mécanique et l’objet industriel envahissent mon travail. Ils constituent une entité omniprésente qui finit presque par masquer la représentation qu’ils devraient servir. La technicité modèle le paysage, l’utilisation de roulettes, d’écrans vidéos, de projecteurs de diapositives, d’excroissances parasitent la lecture : on aboutit à des objets où le sujet est enseveli par ses moyens de représentation. L’appropriation de la nature ne se fait plus uniquement par la promenade, il faut la conserver, la transporter, la considérer comme une propriété qui peut se classer, se ranger comme n’importe quel objet. L’échec nous guette, le moindre dérèglement dans nos processus nous rendra amnésique.

Le paysage devient un enjeu, il sert à présenter des concepts qui ont peu de rapport avec la nature et le monde. Ce détournement correspond à une imposture quand la distance entre le sujet, le paysage, et l’objet quel qu’il soit, devient trop importante. Dans ce contexte il est le personnage d’une histoire qui concerne d’autres valeurs. L’aspect narratif, « Je raconte une histoire », en intégrant la nature comme personnage est abusivement utilisé par la communication. On effectue une superposition entre du beau consensuel, une figure appréciée de tous, et un objet dont il est possible de discuter la valeur. Alors qu’il serait indispensable de critiquer cet objet et de l’analyser dans son contexte d’origine. Nous voyons régulièrement des impostures de ce type où les images qui nous sont proposées sont dévoyées de leur sens premier. La nature bienveillante et pure d’un paysage campagnard a été utilisée par tous les marchands de notre temps. Il est actuellement courant de pervertir un message en imposant une volonté partisane qui passerait pour un conseil éclairé. « Je vous surveille pour votre bien. » Ce constat m’a amené à considérer le paysage sous un angle différent : celui de la dénonciation politique. Comment et dans quel but on utilise tout ce qui a trait à la nature et pour quelles raisons le paysage est instrumentalisé ? Comment notre rapport à la nature et au monde sert-il de prétexte à toute sorte de compromissions mais aussi comment, nous-mêmes, individus vivons-nous un certain nombre de contradictions.

Cette nouvelle approche du monde naturel prend la forme d’un espace narratif, des installations présentées comme des histoires, des saynètes dans lesquelles j’énonce un message naïf et humoristique. L’usage de matériaux de récupération, de présentoir publicitaire, de signalétique routière, d’éclairage, d’objets techniques ré assemblés construit un paysage déjà profondément abîmé. Ces objets issus de la publicité ou de la communication, je les entoure de papier passé dans un destructeur de documents, longs et touffus serpentins qui génèrent une prolifération un peu malsaine. L’utilisation de cette matière première, de ces déchets fabriqués dans le seul souci de conserver un secret qui peut être n’est pas avouable résume assez l’aspect malhonnête des intentions des donneurs de conseils. De plus de petits textes inscrits sur des pancartes sont intégrés aux installations, sorte de cartels qui font partie de l’espace et agissent tel des phylactères. Les panneaux sont placés au sol ou sur un mur, aussi peu différents des mises en garde habituelles telles « pelouse interdite » ou « toilette. Textes, très courts, écrits comme des slogans qui ont la banalité des sentences entendues partout et répétées sans réflexion. Parfois drôles et naïves, souvent pompeuses et prétentieuses ces phrases renforcent la lecture de l’installation qui devient ainsi une sorte de vignette de bande dessinée. L’opération consiste à mettre du doute dans l’affirmation du bon droit et dans la certitude de détenir une vérité indiscutable.

Le bug, c’est l’instant où le discours officiel montre ses limites et sa duplicité, où les certitudes s’effacent. Les bornes ont été arrachées, on les a déplacées et quand la vérité surgit d’un grand bouleversement, nous sommes sans repères. Le bug produit de la transparence dans l’opacité des discours, un disfonctionnement occasionnel démontre l’incohérence des choix qui ont été effectués.

 

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